Le secrétaire d'Etat chargé du numérique veut s'attaquer au « retard » des entreprises françaises sur le sujet.
Est-ce que le rapport que Cédric Villani doit présenter fin mars évoquera l'arrivée de l'intelligence artificielle dans le monde de l'entreprise ?
Il abordera bien l'aspect industriel des outils qui sont mis à disposition, et l'importance d'avoir un écosystème global qui se mette en place autour de l'intelligence artificielle. Mais le rapport va surtout se pencher sur la structuration des talents - comment on les forme, comment on les garde, comment on les développe - et sur la façon d'inciter les investissements.
Les entreprises françaises sont-elles assez avancées dans leur numérisation pour tirer parti de l'intelligence artificielle ?
Non, et c'est là le sujet. L'intelligence artificielle est en soi un sujet spécifique, mais elle constitue aussi de façon plus générale la nouvelle vague de la numérisation. Les entreprises qui étaient déjà en retard sur la numérisation le sont aussi sur la mise en place d'outils d'intelligence artificielle. Sur la partie spécifique, il faudra plus de chercheurs ou de R&D sur des secteurs très consommateurs d'IA, comme la santé, les transports ou l'énergie. Mais l'IA sera aussi un facteur de transformation pour 100 % de l'économie. Et là, on doit rattraper notre retard : la France est 16e au niveau européen pour la numérisation des PME et TPE. C'est pour cela que nous annoncerons un plan pour les aider à se numériser, en partenariat avec les régions, en même temps que le plan sur l'intelligence artificielle. Il faut à la fois aider les entreprises à rattraper leur retard et avoir une première ligne de champions qui deviendront les leaders et les fournisseurs de solutions de demain.
Aujourd'hui, les solutions d'IA pour les entreprises émanent plus de grands acteurs américains, comme IBM ou Google, que de fournisseurs français...
On a quand même pas mal d'offreurs de petite et moyenne taille, que ce soit sur la technologie ou le conseil. Mais ils n'ont pas encore su standardiser des offres de taille internationale, comme ont su le faire les géants américains. Je fais un parallèle avec la cybersécurité : c'est un domaine où nous avons quelques géants français, mais il faut aussi avoir des prestataires locaux de petite taille pour travailler avec les PME. Avec l'IA, il faudrait qu'une PME de 100 personnes qui veut optimiser un processus ou améliorer son marketing puisse avoir accès à un prestataire qui soit à sa bonne taille, avec le bon niveau de compétences. Sinon, nos PME ne pourront jamais se payer un Watson.
Propos recueillis par Benoît Georges
Les Echos du 09/03/2018
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